Platonov amour haine et angles morts en compagnie de Robert Lalonde — #CERCLETP

Platonov amour haine et angles mort

Le troisième rendez-vous du Cercle des Tigres Penseurs de cette année
a eu lieu le samedi 8 décembre 2018, au théâtre Prospero.

Accompagnés du comédien et auteur Robert Lalonde,
les participants ont assisté au spectacle d’Angela Konrad

Platonov amour haine et angles morts.

Voici quelques-uns de leurs commentaires.

 

 

à propos du sujet :

 

« Il y a beaucoup de choses qui ressortent de cette pièce.
Dans un sens, nous sommes tous reliés à l’un des personnages.
Il y un sentiment de proximité, de compréhension et de dualité. »
— Olivier L, chargé de projet

 

« Je ne me reconnais pas dans ces personnages,
mais je ressens le malaise qui plane.
Des non-dits qui mènent à une tension, une violence.
Particulièrement chez le personnage principal,
troublé dans un environnement qui l’est tout autant. »
— Josiane P, étudiante en psychologie

 

« Vous ne trouvez pas que les gens jouent la comédie dans la vie ?
Tcheckhov a écrit que la différence entre les acteurs professionnels et les gens,
c’est que les acteurs sont les seuls à savoir qu’ils mentent. »
— Robert Lalonde, comédien et auteur

 
« Je trouve qu’il n’y a pas assez de non-dits dans la pièce.
Ils se disent tout, crûment. »
— Lucie M, gestionnaire en alimentation
 

« La difficulté de vivre l’amour, la dépendance affective,
la perversion narcissique, le pouvoir de l’argent
font qu’ici la femme et l’homme sont soumis à leurs plus bas instincts.
Il y a beaucoup de détresse. Ils ne savent pas comment s’en sortir.
Je crois que de nos jours, on n’a plus de moyens de s’en sortir. »
— Almée P, retraitée conseillère en éducation.

« Je pense qu’il s’agit plus de désespoir que de bas instincts.
Ce désespoir fait plus mal que les abus. »
— Danielle B, retraitée

 

« Personne ne vient au secours de l’autre.
Personne n’intervient pour arrêter tout ça.
Tchekhov dénonce cette lâcheté. »
— Robert Lalonde, comédien et auteur.

 
« C’est comme une secte maudite. Chacun·e alimente l’autre,
le replonge dans ses dans ses problèmes, le maintenant prisonnier avec elle ou lui
dans un dangereux cercle fermé. Ils vont finir par tout perdre
en ne s’évadant pas de cette prison. »
— David T, pigiste spectacle
« Je crois que selon de l’âge que nous avons et de ce que nous avons vécu,
nous recevons très différemment la pièce.
Moi, je me questionne encore : pourquoi s’attache-t-on à un salaud ?
Parce que finalement Platonov, c’est un maudit courailleux. »
— Lucie M, gestionnaire en alimentation
« D’autant plus que les femmes, ici, savent ce qui se passe,
alors chaque moment devient plus destructeur que le précédent. »
— David T, pigiste spectacle
 

« Tchekhov prend le parti des femmes
en dénonçant l’abus des hommes. »
— Robert Lalonde, comédien et auteur

« Moi, j’ai trouvé le contraire.
C’est humiliant pour les femmes. »
— Ginette D, artiste peintre

 
« Si chacun reste dans ce cercle,
peut-être sont-ils confortables là-dedans ? »
— Olivier L, chargé de projet
« Non, ils ne sont pas confortables.
Il y a des gens qui ne savent pas qu’ils font souffrir
et d’autres qui ne savent comment sortir de la souffrance. »
— Almée P, retraitée conseillère en éducation
« Chez Tchekhov, si les gens semblent aimer souffrir,
c’est parce qu’ils croient ne pas pouvoir faire autrement. »
— Robert Lalonde, comédien et auteur
 

« Les narcissiques sont convaincus qu’ils ne font pas de mal
et qu’ils n’ont aucun problème. Ici, on retrouve le cycle de la violence
et de la manipulation, accompagné de toutes sortes d’excuses
pour mieux recommencer. »
— Josiane P, étudiante en psychologie

« Ce que dit Tchekhov est magnifique :
ce que montre le visage, c’est la trahison.
La pièce nous dit qu’il faut chercher plus loin le sens de la vie
et qu’il y a beaucoup de belles choses dans la vie,
pour peu qu’on sorte de notre habitude du malheur. »
— Danielle B, retraitée

 

« La méchanceté amène la victimisation et la victimisation amène la méchanceté.
La femme de Platonov, on ne peut pas la rejeter ni la trouver idiote,
même si c’est ce qu’on est tenté de faire au départ.
De l’extérieur, on juge, mais quand on s’arrête un peu,
on comprend qu’elle n’a pas vraiment de choix.
Entre deux maux, on choisit le moins fracassant. »
— Nadine F, scripte et cinéaste

 

concernant les éléments scénographiques :

 

« J’ai adoré que ce soit plutôt les corps des acteurs
plutôt que le décor qui occupent tout l’espace. »
— Robert Lalonde, comédien et auteur
[et tous les participants sont d’accord.]

 

« Les maquillages et les coiffures sont très significatifs.
Au début, c’est presque aussi propre et froid qu’au salon mortuaire.
Plus ça va, plus ça se dégrade. Ça devient de plus en plus dur, désordonné… »
— Lucie M, gestionnaire en alimentation

 

« J’ai beaucoup aimé le décor, particulièrement le plancher,
son éclairage blanc contrastant avec les costumes noirs.
Par contre, la passerelle à l’arrière, je me suis demandé pourquoi.
Est-ce pour exprimer le voyeurisme ? »
— Olivier L, chargé de projet

« Je crois que cela exprime le fait qu’ils ne peuvent aller nulle part.
L’éclairage , la musique et le plancher résonnant sont d’une rare efficacité. »
— Robert Lalonde, comédien et auteur

« On aurait dit un podium où, comme dans les défilés de mode,
les acteurs viennent défiler au début.
Les défilés de mode, c’est froid et vide.
Comme le décor pour ainsi dire absent de la pièce. »
— Danielle B, retraitée

 

« Le décor représentait bien Platonov : vide de sens.
Comme sa raison en déroute. »
— David T, pigiste spectacle

 

sur l’interprétation et les personnages :

 
« Tous les acteurs sont excellents et aucun n’est en-dessous de l’autre.
Ils sont très bien dirigés. »
— Olivier L, chargé de projet
[et tous les participants sont d’accord.]
 

« J’ai été très impressionné par le personnage de la générale,
notamment sa consommation d’alcool.
La rage est rarement exprimée par les femmes, surtout comme ça.
La crise de la générale, vers la fin, j’ai trouvé ça super.
Bravo à Violette Chauveau ! »
— Danielle B, retraitée

 
« Le travail corporel ici est très exigeant.
Devoir se tordre et de détordre, changer de ton
et ça, au moment précis où la musique l’exige…
La trame sonore vous maintient toujours sur un fil très mince.
C’est coton à faire. »
— Robert Lalonde, comédien et auteur
 

autour de la mise en scène :

« Même sans fréquenter le théâtre et connaître Tchekhov, ce qui est mon cas,
on comprend très bien la pièce. »
— Ginette D, artiste peintre

 
« C’est une mise en scène travaillée au quart de tour.
La traduction, mais surtout la signature d’Angela Konrad
qui a remixé le tout d’une telle façon que,
moi qui connais bien l’œuvre de Tchekhov,
je suis persuadé que c’est comme ça qu’il aurait aimé voir sa pièce jouée.
Il écrivait souvent aux acteurs et metteurs en scène :
adressez-vous au public, pas seulement les uns aux autres.
C’est mené de main de maître ici ! »
— Robert Lalonde, comédien et auteur
[et tous les participants sont d’accord.]

« On ressent le contexte russe mais pas l’époque.
La pièce est bien d’actualité. »
— Lucie M, gestionnaire en alimentation

« La mise en scène est définitivement contemporaine
et c’est très réussi. »
— Olivier L, chargé de projet

 
« C’est du vrai théâtre. C’est ça qui est le fun. On ne vient pas au théâtre
pour retrouver les scènes de la vie quotidienne traitées en surface,
ou comme à la télévision. On dirait une chorégraphie,
les acteurs font des mouvements très choisis et chaque geste parle. »
— Lucie M, gestionnaire en alimentation
 

« Et au théâtre, on vit directement les événements.
On a souvent eu la chair de poule !
Par exemple, quand la comédienne gratte l’assiette.
Je pense aussi à Platonov qui ouvre la porte,
nous laissant entrevoir qu’ailleurs, dehors,
une autre vie, plus lumineuse, nous attend… »
— Olivier L, chargé de projet

 

 

* crédit photo  : Maxime Robert-Lachaîne